De passage à Nantes, lors du Forum mondial des droit de l’homme, Shirin Ebadi, avocate iranienne en exil depuis la réélection contestée du président Mahmoud Ahmadinejad en juin 2009, est en colère ! La première juge et femme musulmane récompensée pour ses actes militants, lauréate du prix Nobel de la paix en 2003 et auteure de divers ouvrages sur le droit des femmes, des réfugiés et des enfants œuvre pour la défense des droits des femmes et des enfants dans une société musulmane ultra-conservatrice. Face aux journalistes venus écouter son récit, cette habituée des conférences internationales a longuement dépeint les réalités des droits de l’homme dans la république islamique d’Iran. Fragilisé par des divisions au sein même du gouvernement placé sous l’égide du président Mahmoud Ahmadinejad depuis 2005, le pays voit croître le pouvoir économique et politique de l’armée parallèle des Gardiens de la révolution.

Shirin Ebadi est une femme de poigne et des menaces pèsent sérieusement sur elles.
En Iran, tout rassemblement ou contestation sont interdits et font l’objet d’une sévère répression. Shirin Ebadi a joué un rôle important dans la victoire du réformateur Mohammad Khatami à la présidentielle de 1997, parvenu au pouvoir notamment grâce à l’électorat féminin. Cette femme de droit siègera quatre ans en tant que présidente de la cour de Téhéran. Peu après la révolution islamique de 1979, marquée par le retour de l’Imam Khomeyni et l’instauration de la république islamique, Shirin Ebadi est contrainte de quitter son poste, les ayatollahs ayant décrété que les femmes sont trop émotives et irrationnelles pour diriger un tribunal.

Depuis la réélection contestée du président Mahmoud Ahmadinejad en juin dernier, Shrin Ebadi vit en exil, poursuit ses activités militantes et continue de fournir une aide juridique aux personnes persécutées. Plusieurs de ses collègues ont été arrêtés, détenus, parfois longuement, sa sœur notamment. Son mari, lui, est tenu à résidence sur le sol iranien. Ses deux filles vivent à l’étranger. Quant à Shirin Ebadi, elle parcoure le monde et les aéroports pour faire entendre à qui voudra l’injustice subie par ses pairs.

« La pauvreté en Iran ne cesse de progresser ! »

Shirin Ebadi a redit son soutien aux journalistes et s’est dite inquiète du paysage médiatique muselé en Iran. Quarante journalistes blogueurs iraniens sont actuellement emprisonnés dans le pays. Elle a également fustigé la société française Eutelsat dont l’Etat français est actionnaire et qui aurait cédé aux pressions de Téhéran à propos d’émissions en persan sur la BBC et la  Voix de l’Amérique brouillées par le régime. Ces émissions étaient pourtant très suivies en Iran grâce au satellite Hotbird. La société française a retiré BBC et VOA en persan de Hotbird. Les iraniens se retrouvent ainsi pénalisés.

Autre société internationale en ligne de mire: Nokia Siemens. L’entreprise a reconnu avoir « fournie aux autorités iraniennes, la technologie nécessaire à la censure et à la surveillance, contribuant ainsi à la persécution et à l’arrestation de dissidents iraniens». 
Shirin Ebadi a tenu à rappeler la perte de popularité du président Ahmadinejad et son espoir dans la résistance populaire. Le mécontentement du peuple iranien peut faire craindre au gouvernement  une possible nouvelle insurrection.
L’opposition au régime de Téhéran est principalement composée de courants idéologiques divers. Ce mouvement pacifique réclame un gouvernement laïc  ou croit en une possibilité de réformes à l’intérieur même de la République islamique. Mais les iraniens sont-ils prêts pour une nouvelle révolution ?
Shirin Ebadi s’est dit soucieuse de ne pas déplacer le problème fondamental : la question nucléaire qui occupe toute l’attention des états occidentaux au dépend des droits fondamentaux non appliqués dans la société civile iranienne. Le pays détient en outre, le triste record du plus grand nombre d’exécutions des jeunes de moins de 18 ans.

 

Shirin Ebadi à la Cité des Congrès de Nantes au micro de Mathilde Chevré.

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